Parfois
– souvent – en me rendant à la médiathèque, je cherche un ou plusieurs livres
en particulier, que je ne trouve pas. Mais je ne repars jamais les mains
vides : non, je repars toujours avec d’autres livres tout aussi superbes
mais… en plus grand nombre.
De
prime abord, j’avais réalisé une liste d’albums jeunesses classés en
différentes catégories. L’idée était de vous faire des présentations de ces
ouvrages organisées autour de divers thèmes, tels que la rentrée des classes,
l’écologie, l’environnement, les grands-parents, la poésie et bien d’autres
encore. Mais force est d’avouer que j’aurais dû réserver ces albums avant de
partir à l’aventure dans le rayon jeunesse de la médiathèque Michel Crépeau.
Toujours
est-il qu’à défaut de vous présenter des ouvrages articulés autour d’un sujet
précis, je vous présenterai aujourd’hui et pour les semaines à venir trois à
quatre livres « coup de cœur » que j’ai pu dénicher à la médiathèque
du centre de la Rochelle.
Pour
mieux vous expliquer et vous justifier pourquoi j’ai choisi ces livres en
particulier, force est d'avouer qu’en termes d’album jeunesse, j’ai quelques points
faibles. Le premier se situe aux niveaux des couvertures : je me dirige
instinctivement vers les illustrations aux couleurs douces, pâles et pourvues
de traits délicats.
C’est
donc le seul point commun qui relie les trois albums présentés ci-dessous. Mais
je vous l’assure, les prochains articles concerneront des albums avec, pour
toile de fond, un sujet commun.
Poucette,
Hans Christian Andersen, traduit par David Soldi, conte remanié.
Illustrations par Marco Mazzoni.
« Crapauds, hannetons, souris ou
taupe, chacun veut choyer à sa manière Poucette, la toute petite fille à peine
éclose. Grâce aux hirondelles, elle choisit de s’affranchir. »
C’est
cet album et ses illustrations qui m’ont amenée à ne pas suivre ma liste comme
je l’avais prévu. Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas lu un conte d’Andersen,
et quelle joie de retrouver Poucette (ou de la Petite Poucette, suivant les
versions) dont, pourtant, j’appréciais tout particulièrement l’histoire et l’un
des films animés quand j’étais petite !
Vous
devez probablement vous souvenir de cette fillette aussi minuscule qu’un pouce
et dont la beauté n’a d’égale que la douceur. Née au sein d’une fleur à partir d’une
graine d’orge, Poucette est arrachée à sa mère par des crapauds, des hannetons,
une souris et une taupe, avant d’être sauvée par une hirondelle.
A
mes yeux, ce conte, sublimé par les merveilleux dessins de Marco Mazzoni, est
une ode à la nature et aux animaux. Même si certains ne sont pas gentils – en
réalité, hormis l’hirondelle, tous n’ont aucune empathie pour la pauvre
Poucette – les dessins – en particulier des fleurs – sont si captivants que
l’histoire de Poucette devient une aventure au cœur du monde végétal.
Cet
album possède également une certaine profondeur, notamment à travers le
personnage de Poucette. A plusieurs reprises, on lui propose des prétendants
pour un mariage qu’elle ne souhaite pas. Et la fin reste ouverte : même si
l’on peut se douter que Poucette acceptera sans doute une énième demande en
mariage, elle souhaite prendre son temps et découvrir le monde. La fillette
devenue jeune femme jouit alors de sa liberté, et parvient à s’émanciper.
Ce
conte ne possède pas de morale, mais l’émancipation des femmes est toujours un
sujet d’actualité et ce, dans de nombreux pays.
Comme
je l’évoquais précédemment, ce sont les illustrations qui m’ont portée vers cet
album. Et quelles illustrations ! Elles sont de toute beauté, les dessins
sont réalistes et les traits sont fins, avec des teintes de rose et de bleu
travaillées au crayon de couleur.
A
la fin du conte, quatre pages sont consacrées aux explications du pourquoi
cette édition, à la présentation de l’illustrateur, ainsi que des modifications
du conte à travers les décennies. On apprend que cette collection – et donc
cette réédition de contes - est avant tout portée sur l’image et dirigée par
Benjamin Lacombe, illustrateur français connu pour son trait singulier et son
incroyable travail. On y apprend aussi que Marco Mazzoni, l’illustrateur, a un
lien avec ce conte et qu’il a choisi d’illustrer Poucette en suivant avec ses
dessins la métaphore par laquelle l’histoire montre comment Poucette enfant,
devient femme et s’intègre dans le monde.
Les trois petites vies de Petite
Perle, Carl Norac, Anne Catherine De Boel
« Jason, dit Petite Perle, je
vais te dire mon secret. Une semaine sur trois, je suis une fille et je voyage,
parfois en ville, souvent ici. Une autre semaine, je suis un oiseau, je suis
libre et le ciel me connaît. La troisième, je suis une fleur et je me cache.
Voilà, tu sais tout mon ami. Jason, qui avait pourtant lu tant de livres sur la
magie, n’avait jamais entendu une histoire aussi étrange. »
Il
est probable qu’une part d’entre vous ait forcément entendu parler de Carl
Norac, cet auteur de poésies et d'albums jeunesse particulièrement prolifique
et brillant.
A
chaque fois, ces textes nous transportent et « Les trois petites vies de
Petite Perle » ne fait pas exception à la règle.
A
Taiwan, nous assistons à la rencontre entre Jason, un jeune garçon sensible à
la magie, et Petite Perle, nommée Liu, une étrange fillette de son âge qui lui
confie son secret : toutes les trois semaines, une nouvelle vie s’offre à
elle, elle est une fille, puis un oiseau et une fleur qui se cache.
Une
amitié sincère et d’une pureté grandissante nait entre Jason et Liu qui
souhaitent ne plus se quitter. C’est ainsi que nous suivons Jason et chacun de
ses efforts pour protéger Liu lors de ses deux autres vies (d’oiseau et de
fleur).
Ce
texte est juste et le contexte est très touchant. Et naturellement, les magnifiques
illustrations aux pastels d’Anne Catherine De Boel participent avec merveille à
la beauté de cet album.
Les pages sont grandes et le travail des couleurs est
soigné. De plus, durant deux doubles pages, lors des changements de Liu, les
dessins sont à l’aquarelle, participant à l’atmosphère de douce métamorphose de
cette l’histoire.
La
fin est captivante, et garde l’émotion touchante de cette belle amitié tissée
entre Liu et Jason qui nourrit le texte où les couleurs se fondent avec
délicatesse.
Même
si certaines pages ne prêtent pas à une grande facilité de lecture, le texte
noir étant sur fond foncé, cet album a été une très jolie trouvaille. De plus,
j’ai particulièrement apprécié les touches culturelles qui nous renseignent sur
Taïwan.
Graines de sable,
Sibylle Delacrois, sans résumé
J’ai
beaucoup hésité à vous présenter cet album, car par rapport aux autres
ouvrages, une petite chronique sur ce livre me paraissait plus difficile à
rédiger.
Une
petite fille rentre de ses vacances à la plage avec son petit frère et ses
parents. Indubitablement, la tristesse l’envahit dès qu’elle pose le pied chez
elle. La mer et la plage lui manquent. Mais heureusement ! Elle a rapporté
avec elle un trésor : des grains de sables. Peut-être qu’en les semant
elle pourra retrouver ce qui lui manque tant ? Vagues immenses, parasols,
châteaux de sable et glaces rafraîchissantes peuvent-ils revenir grâce à ces
graines de sables ?
Bêtement,
je me suis dit qu’une présentation aurait été futile, que le sujet des
« vacances » était moins intéressant à exposer.
Puis,
je me suis rendue compte que pour faire un bon livre jeunesse, il ne fallait
pas forcément que le sujet soit actuel, profond ou empli d’émotion.
De
prime abord, cet album est simple, mais la dynamique qu’il contient est très
intéressante.
Grâce
à ce livre, les enfants peuvent retrouver tout ce que l’on peut voir à la mer
et à la plage, avec douceur et bienveillance. De plus, on y constate une
certaine légitimité de la tristesse de l’enfant par son père qui se montre
compréhensif. Elle est triste car les vacances sont finies : même s’il y a
probablement plus grave dans la vie, cette tristesse, elle a le droit de le
ressentir.
En
termes de dynamique, la façon dont sont choisis et employés les mots est
étonnante. On y trouve des métaphores – métaphores qui, pour les enfants, sont enrichissantes.
Deux parallèles sont faits entre l’eau des vagues et l’expression « vague
à l’âme », puis entre les grains de sable et « le marchand de sable ».
Les phrases de chaque double page étant construites de la même manière, les
répétitions engagent les enfants à réfléchir en même temps que les personnes du
livre, en cherchant tout ce que l’on trouve sur la plage pendant les vacances.
Concernant
les illustrations, les dessins sont effectués au crayon de bois et sont emplis
de candeur. Deux couleurs sont prédominantes au fur et à mesure des
pages : le bleu et le jaune, qui, naturellement, rappelle les vacances au
bord de la mer.
L’album
est assez grand et chaque double page ne possède qu’une ou deux phrases donc il
sera, je pense, plutôt facile à présenter à votre jeune auditoire, qui
apprécieront sûrement les dessins mignons et attractifs. Et, pour faire rêver
les enfants, après tout… pourquoi les grains de sables ne pourraient-ils pas
être des graines ? Pourquoi ne pas cultiver le sable et faire pousser des
choses extraordinaires ?